Je ne surprendrai personne en annonçant l’égoïsme apparent de notre société.
Je dis bien « apparent » parce que cet égoïsme est souvent le regard qu’on pose sur un comportement à un moment précis.
Imaginons par exemple, que je vois une personne assisse par terre avec un sac en toile, habillée de plusieurs couches de vêtements, la tête baissée, un chien à ses côtés, un chapeau renversé devant elle en attente de dons pour survivre.
Dans le même contexte, imaginons que je prenne le temps quelques minutes pour observer les passants. Un. Puis deux puis trois, quatre… dix, vingt, etc.
Et que sur la majorité de ces passants, il n’y en ai qu’un ou deux qui répondent à cette demande de dons.
Pour autant, tous ces « non-donneurs » sont-ils égoïstes ? Qui me dit qu’ils n’ont pas donné une pièce à un autre demandeur en survie plus loin ? Quelques instants avant. ou un autre jour. Qu’est-ce qui me dit que ces « non-donneurs » du moment et que j’ai observé n’ont pas un ordre permanent au profit de médecin sans frontières ou de child focus ou d’une quelconque autre organisation caritative ? Qu’est-ce qui me dit que ces « non-donneurs » de l’instant ne comptent pas les derniers euros qu’il leur reste pour nourrir quelques bouches à la maison ?
Autre exemple, imaginons que je reçoive via un réseau social des propositions, des invitations à des événements qui ne m’intéressent pas et que ma réaction soit : « ils me font tous chier avec leurs intrusions, je n’ai rien demandé ! C'est honteux !». Et que je poste ma réaction sur ce même réseau en expliquant mon ras-le-bol de ce non respect de ma vie privée, de mes choix, etc.
Dans ce même contexte, qu’est-ce qui me dit que cette notification ou invitation ne vient pas d’un indépendant qui cherche à faire connaître son activité, à la proposer au plus grand nombre ? Et que si ce même indépendant ne le fait pas, peut-être qu’il n’aura pas touché les personnes intéressées et qu’il passera à côté de revenus que seule son activité lui apporte…
Et si, par tolérance, j’essayais de comprendre. Juste l’espace d’un instant, ce mendiant qui fait ce qu’il peut pour survivre. Pour regarder avec un autre œil ces passants « non généreux ». Pour me glisser, l’espace de 15 secondes dans la peau de cet entrepreneur qui lui aussi, essaye de gagner sa croûte.
Et si l’espace de plusieurs instants (un maximum est très bien), j’acceptais que chacun a ses raisons d’agir comme il agît dans ces gestes du quotidien. Que peut-être je ne les connaîtrai jamais et que ça n’a pas d’importance. Parce qu’on est bien d’accord qu’on n’est pas en train de juger de faits graves non plus… Il s’agit de décisions individuelles de la vie de tous les jours en fonction de priorités personnelles, de valeurs personnelles aussi. Des valeurs et des priorités que moi aussi j’ai ! Et qui sans doute sont différentes de celles des autres. Des valeurs et des priorités qui peuvent changer. D’un jour à l’autre. D’un mois à l’autre. D’une année à l’autre… Et qui dans TOUS les cas, n’ont ni plus ni moins de valeur que celles de ces inconnus que je croise.
Elles sont justes différentes.
Être tolérant, c’est accepter la divergence d’opinion sans chercher à convaincre.
Être tolérant, c’est accepter que l’autre n’a pas les mêmes priorités ou les mêmes valeurs.
Être tolérant,c’est accepter que l’autre peut avoir un ou des besoins différents des miens.
Être tolérant c’est accepter que l’autre n’a pas le même besoin au même moment que moi…
Être tolérant c’est accepter… l’autre
Jusqu’à un certain point.
Est-ce que pour autant, sur base de cette tolérance , je dois tout accepter ?
Évidemment non !
Refuser n’est pas être intolérant.
Refuser, c’est respecter ses propres valeurs et ses propres besoins.
Et toute la difficulté et en même temps la richesse de l’exercice résident dans cette question :
« A quel(s) moment(s) est-ce que je respecte mes valeurs, mes besoins, mes priorités ? Et à quel(s) moment(s) je respecte les valeurs, les besoins, les priorités de l’autre ? »
Aimez-vous !❤
Patrick